
Lorsque j’étais en formation à FaKtoria et faisais mes chroniques hebdomadaires sur Instagram, j’étais très souvent sollicitée pour obtenir des informations sur mon parcours de reconversion. J’ai pris plaisir à répondre à chacune des demandes, car moi-même avant de franchir le cap, je me suis beaucoup questionnée et étais avide de retours d’expériences (que j’ai peu trouvé).
Aujourd’hui encore, dans une moindre mesure, je reçois encore des questionnements. Voici donc le récit de mon expérience, non universelle mais le plus exhaustive possible.
En 2021, à 40 ans, j’ai un boulot stable, a priori enviable et pour lequel je suis reconnue. Je suis cadre en CDI, responsable du Pôle régional d’éducation aux images (seulement 10 postes en France). Je coordonne sur le territoire de Nouvelle-Aquitaine les politiques publiques (Région, État, Départements) en matière d’éducation aux images en prenant soin de les faire répondre au mieux aux besoins des professionnels de terrain (salles de cinéma, médiathèques, animateurs, éducateurs, enseignants, réalisateurs, scénaristes). Dans le fonds et sur le papier, la mission est belle et stimulante. Sauf qu’après 11 ans de bons et loyaux services et un investissement sans faille, je suis usée d’essayer de faire cohabiter politique et réalité.
En 2021, je suis aussi à l’aube d’un burn-out.
J’ai perdu le sommeil, je multiplie les crises d’eczéma et ma sensibilité est exacerbée. Une séance d’ostéopathie m’aide à ouvrir les yeux : je m’écroule, me mets à pleurer et trembler sans plus pouvoir m’arrêter des heures durant.
Je prends alors le temps d’un bilan de compétences et d’une profonde réflexion. Mon boulot, ma vie. Ce fut laborieux puis évident : ce travail ne me permet plus de m’épanouir. Pire, il m’use, littéralement.
Par ailleurs, côté perso, pour avoir traversé l’épreuve d’une maladie chronique (Crohn) avec ses multiples hospitalisations et opérations et du faire un deuil douloureux suite au décès brutal d’un grand amour et de ses promesses, je ne sais que trop bien Ô combien la vie est fragile et précieuse.
Alors, au regard des épreuves traversées et des espoirs que je nourris, je choisis de faire confiance à cette envie de création, d’artisanat (qui date déjà de l’époque du collège !) et je démissionne.
En ligne de mire : me former 10 mois durant et passer un CAP « tournage en céramique » avant d’ouvrir un atelier qui sera à la fois lieu de création, de fabrication et de transmission d’un savoir-faire artisan et ancestral.
Cela étant, avant de donner ma démission, j’ai tout de même un peu balisé le terrain :
- Passer l’entretien à FaKtoria, seule école de formation professionnelle à la céramique en Nouvelle-Aquitaine et m’assurer de mon admission.
- Ensuite, demander une rupture conventionnelle, qui malheureusement me sera refusée.
Commence alors un marathon administratif pour démissionner en conservant mes droits au chômage (je fais le choix de me passer des indemnités qui m’auraient été dues mais ne peux pas me permettre de partir sans indemnités chômage immédiates).
Je fais alors appel à Transitions Pro, organisme habilité par l’État pour financer et sécuriser les reconversions professionnelles des salariés du privé. Sur leur site, la phrase d’accroche, c’est « changer de métier, tout simplement ». Bon, en vrai c’est quand même pas si simple que ça.
D’abord, il existe plusieurs dispositifs au sein de Transitions Pro, certains plus avantageux que d’autres. Par exemple, Projet de Transition Professionnelle permet de conserver son boulot et son salaire et de s’en absenter le temps de la formation nécessaire à la reconversion. Il y a même tout ou partie de la formation qui est prise en charge. Dans mon cas, je sais que je ne peux pas y compter : ça me sera refusé par mon employeur et surtout, je veux pouvoir partir rapidement de mon travail et intégrer la promo FaKtoria à la rentrée 2022.
Un échange avec ma CEP (Conseillère en Evolution Professionnelle – c’est un accompagnent obligatoire pour tout projet de reconversion en lien avec Transitions Pro) à l’APEC détermine rapidement que dans mon cas, c’est le dispositif « Démission-Reconversion » qui est approprié. Il ne permet aucune prise en charge financière mais permet de démissionner en conservant ses droits au chômage.
Il implique également de créer son entreprise dans les 6 mois qui suivent la démission. Au 1er janvier 2023, je créée donc MUSARDE, ma micro-entreprise.
Pour cela, il faut qu’un comité paritaire valide le sérieux du projet, à partir de différents éléments à fournir : formulaire de présentation et argumentation du projet + étude de marché + prévisionnel financier sur 3 ans.
Me voici donc lancée dans l’aventure des enquêtes métiers, étude du marché, et projections budgétaires. Heureusement pour ce dernier point, je suis aidée par un expert-comptable (c’est un accompagnement gratuit prévu dans ce cadre-là, rendu possible grâce à quelques experts comptables qui acceptent de faire cet accompagnement gracieusement. L’APEC m’avait fourni une liste).
Quatre mois après le début des démarches et quelques sueurs froides plus tard, un comité paritaire valide le sérieux de mon projet, m’autorisant ainsi à démissionner. Le baume au cœur, je rédige ma lettre de démission et l’envoie dans la foulée !
À ce stade, je n’ai donc plus que 3 mois de préavis à effectuer avant d’amorcer un nouveau pan de ma vie.
Enfin, presque, parce que l’école de formation est à Biarritz et que moi, j’habite Bordeaux. Il me faut donc trouver un logement. Là j’ai de la chance : une de mes sœurs habite Bayonne et accepte de m’héberger le temps de la formation. Je lui suis infiniment reconnaissante, car la qualité de son accueil a beaucoup fait dans mon parcours de reconversion.
Et puis qui dit pas de rupture conventionnelle dit pas d’indemnités de départ. Et il faut quand même payer l’école. 14 300€, ça n’est pas rien. Heureusement, après mon bilan de compétences, il reste quand même un peu d’argent sur mon Compte Professionnel Formation (900€) et j’ai un Plan Épargne Entreprise sur lequel il y en a aussi (3 000€). J’obtiens également une aide de la région à hauteur de 3 000€ via l’Aide Individuelle à la formation (je tente aussi du côté Pôle Emploi mais là, rien n’est possible). Mais bon, les comptes ne sont pas encore bons ! 🙂 Je décide alors de vider ma maisonnette de façon à pouvoir la louer le temps de la formation.
Tout ça, c’est du boulot, un peu de stress, mais ça avance et je sens que les choses se mettent en place. Elles s’alignent peu à peu, tout comme moi. Je sens que ce nouveau chemin qui est en train de s’écrire est le bon. Et bonne nouvelle, 1 an ½ et un diplôme plus tard, cette sensation est toujours la même et je suis profondément heureuse d’écrire cette nouvelle histoire !
Les prémices de ma reconversion en bref :
- Octobre 2021 -> janvier 2022 : bilan de compétences
- Février 2022 : prise de contact avec Transitions Pro et l’APEC.
- Février – avril 2022 : accompagnement par l’APEC avec une Conseillère en Évolution Professionnelle (CEP). Élaboration de mon dossier de reconversion professionnelle (dossier de candidature, étude de marché, prévisionnel financier).
- Avril 2022 : dépôt de dossier à la commission « Démission-Reconversion » de Transitions Pro.
- Mai 2022 : validation de mon projet par la commission paritaire. Je gagne le droit de démissionner en conservant mes droits au chômage. Dans la foulée, je pose ma démission.
- 1er juin -> 31 août 2022 : j’effectue mon préavis.
- Fin août 2022 : je quitte momentanément Bordeaux pour déménager à Bayonne.
- 5 septembre 2022 : rentrée en formation à FaKtoria Biarritz et début d’une nouvelle vie !
- 1er janvier 2023 : création de MUSARDE, ma micro-entreprise.
- Mai-juin 2023 : épreuves du CAP tournage en céramique.
- Juillet 2023 : obtention du CAP et retour à Bordeaux !